Mission encre noire
Émission du 27 avril 2021
Mission encre noire Tome 31 Chapitre 356. Ville contre Automobiles, redonner l’espace urbain aux piétons par Olivier Ducharme Paru en 2021 aux éditions Écosociété dans la collection Polémos Combattre, débattre. Dans la ville de demain, la voiture n'aura pas lieu d'être. Pour vous en convaincre Olivier Ducharme se propose de remettre les pendules à l'heure avec cet essai courageux et lucide. L'automobile est un piège dans lequel un pan entier de la planète est tombé. L'auteur livre un état des lieux exhaustif des dégâts causés sur la ville et notre environnement direct par ce qu'il faut bien reconnaître comme l'invasion grandissante de ces «requins d'acier». L'automobile est devenue, à notre corps défendant, l'étalon de mesure de la planification urbaine, au détriment de la tranquillité de ses habitants. Sur le modèle de certaines métropoles européennes, Olivier Ducharme réclame ni plus ni moins que le bannissement des autos au profit du transport collectif, et de la marche, pour remettre la vie de quartier et une réelle transition écologique au coeur de nos préoccupations. Je reçois Olivier Ducharme à Mission encre noire.
Extrait:« Broadacre City ressemble à une énorme banlieue qui s'étend à la grandeur du pays. Il devient difficile d'appeler cela une ville ; nous sommes plutôt devant un découpage du territoire divisé en unités d'une acre et traversé par un circuit d'autoroutes et de superautoroutes. Broadacre City est demeurée une vue de l'esprit. Nous ne sommes toutefois pas trop dépaysés face au portrait offert par Wright. Le parallèle avec la vie de banlieue actuelle est frappant. En plus de voir son utopie demeurer lettre morte, Wright a constaté que sa critique générale de la place de l'automobile dans les villes n'a pas été entendue. Pour Wright, la ville traditionnelle est trop étroite pour accueillir du matin au soir un flot continu d'automobiles. Il fallait repartir sur de nouvelles bases pour que les villes s'adaptent à la vitesse des automobiles et à leur constant besoin d'espace.»
Faut-il en finir avec la civilisation, primitivisme et effondrement, par Pierre Madelin, paru en 2021 aux éditions Écosociété dans la collection Polémos Combattre, débattre. Et si les sources de la crise écologique actuelle se trouvaient quelques part il y a une dizaine de milliers d'années ? Est-il raisonnable de penser que c'est notre sédentarisation qui marquerait le début de la destruction de la nature ainsi que de celui de notre soumission à des systèmes de pensée écocides? Pour les partisans des théories primitivistes la réponse est oui. Pierre Madelin examine à la loupe ces propositions, dans l'urgence, comme s'il pressent le danger de tomber dans un piège idéologique se drapant dans les valeurs et les idéaux d’un monde moderne aux abois et avide de solutions à court terme. En contrepoint, l'auteur se consacre au rapport que les sociétés occidentales entretiennent avec la nature, à travers le «culte de la wilderness» (nature sauvage) par le biais de l'histoire de la création des grands parcs nationaux américains au XIXeme siècle et la rencontre de figures marquantes du mouvement tels Edward Abbey, John Muir et Henry David Thoreau. Pierre Madelin est invité à Mission encre noire.
Extrait:« Sur le plan littéraire, c'est sans doute dans le Désert solitaire d'Edward Abbey, publié en 1968, que s'exprima avec la plus grande vigueur - mais aussi avec un sens de l'humour décapant - la critique déjà ancienne des parcs nationaux et de leur aménagement. Alors qu'il était employé saisonniers du parc national des Arches dans l'Utah, Abbey décrivit avec amertume tout ce qu'une zone naturelle protégée par l'État «comporte de policiers, d'administrateurs, de routes goudronnées, d'itinéraires aménagés pour les voitures, de points de vue panoramiques officiels, de terrains de camping obligés, de laveries automatiques, de cafétérias, de distributeurs de Coca-cola, de toilettes à chasse d'eau et de droits d'admission». Mais ce sont indéniablement les voitures, qu'il nomme selon les pages «coquilles métalliques», «mollusques à roulettes» ou fauteuils roulants motorisées», qui suscitèrent ses critiques les plus acerbes. Aussi appelle-t-il les visiteurs à quitter leurs voitures, à délaisser un rapport purement spectaculaire aux paysages afin de renouer avec une expérience physique, charnelle du monde: «soulevez vos derrières en caoutchouc-mousse, levez-vous, tenez-vous droit comme des hommes ! comme des femmes! comme des êtres humains! et marchez - marchez - MARCHEZ sur votre terre douce et bénis !». »
Feuille de route
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Émission du 27 juin 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 412. Troubles, nos ombres un collectif dirigé par Jennifer Bélanger paru en 2023 aux éditions Triptyque dans la collection Queer. La colère ne se tarit pas dixit l’autrice. De l’élaboration de ce projet à l’été 2020, à son achèvement en 2022, Safia Nolin deviendra la bête noire des réseaux sociaux malgré son récit d’agressions subies de la part de Maripier Morin, la montée de la droite aux États-Unis et celles des conservatismes en général dans le monde, dès lors menace les droits fondamentaux des personnes minorisées. Les textes réunis ici par Jennifer Bélanger offre un espace sécuritaire à 11 artistes non seulement pour témoigner de l’urgence de dire les dangers qui guettent les personnes LGBTQ2IA+, mais également pour nous partager des récits de vie poignants. Qu’il s’agisse d’amitié, de rapports amoureux, de désirs, de colère, de résistance, Étienne Bergeron, Julie Bosman, Marilou Craft, Nicholas Dawson, Martine Delvaux, Sandrine Galand, Maude Lafleur, Mael Maréchal, Roxane Nadeau, Mélanie O’Bomsawin et Justina Uribe se réunissent sous l’ombre lumineuse et créatrice de Jennifer Bélanger, qui est mon invité, ce soir, à Mission encre noire.
Émission du 6 juin 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 411. Mise en forme par Mikella Nicol paru en 2023 aux éditions Le Cheval D’août. À la suite d’une rupture amoureuse encore fraîche et de l’aménagement en catastrophe chez un ami, la narratrice se jette à corps perdu dans l’entraînement physique. Malgré que son corps deviennent de plus en plus performant, la dépression gagne du terrain, il y a toujours quelque chose qui cloche. Ce qui s’impose très vite comme la seule activité encore valable à ses yeux va devenir un sujet de réflexion tenace. Et si, en dépit des injonctions bénéfiques assénées par les vidéos de fitness, les programmes de remises en forme n’étaient que la partie émergée d’une problématique plus vaste. Pour l’autrice l’idée jaillit en croisant un inconnu malveillant dans la rue. Le lien qui unit violence et beauté ne fait plus aucun doute. Ou comment l’industrie du fitness, entre autre, confirme la main mise d'une esthétique patriarcale, coloniale et fossile, sur le discours ambiant, dixit Paul B. Preciado. On peut se demander, ici, comment un tel système, qui vise la soumission collective totale des corps, se met-il en place ? Les femmes en particulier, tels des objets inoffensifs, se doivent de collaborer, bien entendu, à leur corps défendant, à des modèles hétérosexuels astreignants. Ce livre à mi-chemin de l’essai et du récit autobiographique laisse libre court à une parole qui refuse de rentrer dans le moule. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Mikella Nicol.
Émission du 23 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 410. Daniel Grenier Héroïnes et tombeaux paru en 2023 aux éditions Héliotrope. Alexandra Pearson, originaire du Tennessee, lit le New York Times dans cette ville secondaire brésilienne à l’ouest de Porto Alegre : Uruguaiana. Aujourd’hui journaliste, la jeune femme qui avait cheminé aux côté de Françoise dans le roman précédent de l’auteur, part à la recherche, cent ans plus tard, d’un étrange personnage, Ambrose Bierce, auteur du Dictionnaire du diable. Il serait mort fusillé en 1915 au Mexique et réapparu, bien vivant, à des milliers de kilomètres plus loin. Pour cela, elle devra mettre la main sur un manuscrit inédit. Pendant ce temps, comme l’annonce le journal, une certaine Helen Klaben décède à l’âge de 76 ans. Autrefois, elle a fait la Une du Life magazine, le 12 avril 1963, après avoir survécu 49 jours dans le froid du Yukon suite au crash de leur avion le 3 février 1963. Étrange coïncidence, ce nom, lui semble familier. Il lui remémore un souvenir amer, celui de Françoise, cette fille à qui elle n’a fait que mentir. À l’époque elle se faisait appeler Samantha. Dans ce troisième livre qui se veut un hommage à Ernesto Sabato, l’auteur nous entraîne dans un étrange roman d’aventures dans lequel il explore une fois encore le territoire américain et il s’interroge sur la responsabilité de celui qui raconte les histoires des autres. Sur un air de Carioca, j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Daniel Grenier.
Émission du 16 mai 2023
Mission encre noire Tome 38 Chapitre 409. Exercices de joie par Louise Dupré paru en 2023 aux éditions du Noroît. Dernier fascicule du triptyque traitant des possibilités du poétique face à l’horreur et à la détresse entamé avec Plus haut que les flammes en 2010 puis La main hantée en 2016, Exercices de joie présente la poète fébrile, les côtes friables, hantée par des rêves qui la réveillent la nuit. Toutefois Louise Dupré n'abdique pas pour autant. Elle revendique le désir de se tenir debout devant un paysage en ruines quitte à s'accrocher à ses mots comme à une bouée. Car, s'il est peut-être vain de vouloir comprendre l’envers du monde quand le temps fuit entre nos doigts, pourquoi ne pas apprivoiser les douleurs, en oublier la piqûre de l’aiguille. L’écriture, telle une veine fragile qui palpite encore, se mue en écorce revêche, pour combattre en prose et en vers. Si la suie de Birkenau ou de Auschwitz la poursuit encore, si l’ombre de la main coupable du second recueil habite encore les pages, les poèmes explorent ici une autre voie, plus apaisée. Celle de la douceur, celle de la joie, que l'autrice défini comme cet instant précieux et rare ou le cœur module ses élans. Il est du devoir de la poète de donner à voir cette faible clarté bienveillante qui conduit sa main. Certes, le cercle des poètes disparus s’agrandit un peu plus chaque jour, le monde chancelle ; non, elle ne vacillera pas ; l’autrice appartient à la généalogie des femmes qui n’ont jamais renoncé. J’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Louise Dupré.
Émission du 2 mai 2023
Mission encre noire Tome 37 Chapitre 408. Le plein d’ordinaire par Étienne Tremblay paru en 2023 aux éditions Les Herbes Rouges. Asti qu’était belle! se dit Mathieu alors qu'il entre dans le Pétro sur le boulevard qui mène vers Longueuil, proche de l’usine Weston. Elle, c’est Val, sa future collègue que l’adolescent de Boucherville va chercher désespérément à séduire. Le futur cégépien est persuadé d’être promis à un grand destin de poète, cela sera-t-il suffisant pour elle? En attendant, il travaille de nuit dans une station-service à distance de vélo de chez lui. Une job parfaite qui lui permet de lire à sa guise, de consommer ses trois gammes de pot, de voler des cigarettes et de manger à volonté. Mathieu illustre à merveille la chronique ordinaire d’un ados de banlieue des années 2000. Une jeunesse qui se mélange, qui se passionne, qui se voit un avenir exceptionnel, qui rêve la vie en grand plutôt qu’à travers le miroir aveugle de l’écran noir d’un cellulaire. Mathieu n’a rien de différent des autres, si ce n’est l’élan que lui procure une sensibilité exacerbée et un certain goût du risque. Des excès qui fatalement se fracasseront contre le mur des réalités. Voici un roman initiatique qui relate l’aventure épisodique, très attachante, d’un jeune homme en quête de lui-même, pris au centre de son univers sensible, près à devenir un autre Mathieu, même s'il ne sait pas très bien encore à quoi cela ressemblera. J’accueille, ce soir à Mission encre noire, Étienne Tremblay.