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Mission encre noire

Émission du 2 mai 2023

Mission encre noire Tome 37 Chapitre 408. Le plein d’ordinaire par Étienne Tremblay paru en 2023 aux éditions Les Herbes Rouges. Asti qu’était belle! se dit Mathieu alors qu'il entre dans le Pétro sur le boulevard qui mène vers Longueuil, proche de l’usine Weston. Elle, c’est Val, sa future collègue que l’adolescent de Boucherville va chercher désespérément à séduire. Le futur cégépien est persuadé d’être promis à un grand destin de poète, cela sera-t-il suffisant pour elle? En attendant, il travaille de nuit dans une station-service à distance de vélo de chez lui. Une job parfaite qui lui permet de lire à sa guise, de consommer ses trois gammes de pot, de voler des cigarettes et de manger à volonté. Mathieu illustre à merveille la chronique ordinaire d’un ados de banlieue des années 2000. Une jeunesse qui se mélange, qui se passionne, qui se voit un avenir exceptionnel, qui rêve la vie en grand plutôt qu’à travers le miroir aveugle de l’écran noir d’un cellulaire. Mathieu n’a rien de différent des autres, si ce n’est l’élan que lui procure une sensibilité exacerbée et un certain goût du risque. Des excès qui fatalement se fracasseront contre le mur des réalités. Voici un roman initiatique qui relate l’aventure épisodique, très attachante, d’un jeune homme en quête de lui-même, pris au centre de son univers sensible, près à devenir un autre Mathieu, même s'il ne sait pas très bien encore à quoi cela ressemblera. J’accueille, ce soir à Mission encre noire, Étienne Tremblay.

Extrait Pas de doute, j'étais un poète. Je sais pas pourquoi je l'oubliais des fois d'ailleurs. Une chance que Dom était là pour me le rappeler souvent. Lui, il en était un, sûr et certain. Ou non, peut-être que Dom était plus un philosophe? Un peu des deux je pense. C'est normal, il est plus vieux que moi. Mais moi, poète, ça me suffisait depuis que j'avais découvert que je l'étais. C'est sûr que j'avais pas écrit grand-chose cet été, mais ça amoindrissait pas ma vraie nature. Tout est là, dans ma tête. Ça va sortir en temps et lieu. Une tête bien faîte, comme disait le Français de Dom, c'est là-dessus que je travaillais cet été. Il fallait que je montre à Val que j'étais détaché des choses d'ici-bas. Qu'il y avait une douve entre le monde et moi. Elle verrait combien je suis sensible et profond. J'ai botché ma clope et je suis rentré. À l'intérieur, Val me regardait les bras croisés. Comme je me sentais rougir en marchant, j'ai compensé en la regardant droit dans les yeux. Elle a souri. Moi aussi. Je suis passé derrière le comptoir et j'ai croisé un bras comme elle. Une minute a passé. Il y avait personne dans le magasin, personne aux pompes. Ça me prenait toute mon énergie pour m'empêcher de rompre le silence. Les choses d'ici-bas ne me font rien. Une douve. Une tranchée. Ne pas parler. Mais ça a payé. C'est elle qui l'a fait d'abord. Fak ? J'ai ri un peu. Je me suis gratté la joue et je me suis tourné vers elle.»

Domaine Lilium par Michael Blum paru en 2023 aux éditions Héliotrope dans la collection Noir. Dan Katz Débarque à l’aéroport CDG pour faire des recherches pour écrire un livre d'architecture autour de l'histoire concentrationnaire. Il s'intéresse plus particulièrement à la cité de la Muette en banlieue parisienne. Un lieu qui a tour à tour joué le rôle d’habitat social moderne, d’internement sous l’occupation nazie, caserne de gendarmes puis de HLM. Ses passeports israélien et canadiens, lui permettent de voyager sans trop de problème pour compléter ses enquêtes. À travers les archives, il découvre la responsabilité du lieutenant de gendarmerie Henri Cannac dans la torture et la déportation de ses grands-parents. Joseph et sa femme Colette sont parmi les mille déportés du convoi numéro 57 du 18 juillet 1943. Si Henri est décédé depuis longtemps, son petit-fils, lui, sévit encore, à la tête du Parti de la France. La tentation est grande de lui faire payer les exactions de la famille, même si, à lui-seul, le petit gendarme ne peut être tenu responsable de l’holocauste. Pourtant la méticulosité et l'acharnement de Katz vont lui révéler les curieux projets du politicien. Notamment celui qui implique des intérêts fonciers au Québec. Katz prend tous les risques pour déjouer ses plans, y compris celui d’y laisser sa peau. À force de naviguer dans les eaux sombres de la masse mouvante de l’histoire, Katz nous dévoile les traits d’un visage reconnaissable entre tous, toujours autant d’actualité, celui de la haine de l’autre. Je vous propose de vous laisser chavirer par ce percutant roman noir, j’accueille, ce soir, à Mission encre noire, Michael Blum.

ExtraitDes décisions devaient être prises même s'il ne parvenait pas encore à les formuler. L'envie de sortir pour décanter ses idées s'imposa à lui. Il remonta la rue Auguste-Blanqui, puis prit Henri-Barbusse à droite et Gaston-Landry, qui devenait Sacco et Vanzetti un bloc plus loin. La banlieue rouge et ses odonymes à la gloire d'une gauche encore debout lui plaisaient. En continuant tout droit sur Maxime-Gorki, il remarqua, après quinze minutes de marche, que ses pensées commençaient à se mettre en mouvement. À l'évidence, il ne trouverait rien en googlant Henri Cannac, à moins que sa vie ait été documentée post mortem. Katz voulait connaître les grandes lignes de son CV après la guerre, particulièrement savoir s'il s'était engagé en Indochine ou en Algérie pour continuer à abuser de l'immunité conférée par le képi. D'autres gendarmes de Drancy avaient eu cette idée, à commencer par leur chef, Marcellin vieux, celui qui revint en France de son exil argentin pour aller massacrer des algériens. Katz voulait en savoir plus sur cette crapule que même ses propres hommes détestaient.»

Feuille de route

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Mission encre noire 15 juin
Émission du 15 juin 2021
Mission encre noire Tome 31 Chapitre 361. Le murmure des hakapiks, la troisième enquête de Joaquin Moralès par Roxanne Bouchard paru en 2021 aux éditions Libre Expression. Érik Lefebvre et Joaquin Moralès s'engagent pour la Traversée de la Gaspésie à ski. Debout dans la timonerie du Jean-Mathieu, Bernard Chevrier regarde l’agente Simone Lord embarquer à titre d’observatrice, sur le chalutier en partance pour le Groenland pour la chasse au phoque, malgré le Nordet qui s’annonce. Pour se rendre à destination, au Nouveau-Brunswick, il faut contourner l’Île-du-prince- Édouard, mais aussi pénétrer profondément dans le détroit de Northumberland, qui en cas de vent fort se transforme en étau, même pour une coque en acier, sous le poids de la glace. Pourquoi l’institution fédérale Pêches et Océans délègue-t-elle une agente directement dans les griffes de quatre hommes au passé douteux? En attendant de rejoindre son compère, Joaquin loge son fils depuis qu'il a débarqué chez lui, soûl. La gorge nouée, le père saisit le jonc pour un dernier adieu à son histoire commune avec Sarah. Ils divorcent. Comme lui suggère son notaire, le plus dur n’est pas de signer les papiers. Même si le goût lui manque, il prend enfin la direction des abords du Saint-Laurent, avec un bon roman dans les poches, histoire de se changer les idées. La psychologue judiciaire Nadine Lauzon fait partie du voyage, avec un dossier plutôt brûlant en cours. Pour l’enquêteur Moralès la lecture de Gabriel Garcia Marquez attendra. Fort du succès de La mariée de corail, ce roman en est la suite tout aussi palpitante. Je reçois, Roxanne Bouchard à Mission encre noire. Extrait:« Bernard Chevrier met le moteur en marche. La journée tire à sa fin quand l'agente Lord sort sur le pont pour assister à l'appareillage du Jean-Mathieu. Marco Painchaud a passé presque une heure à chercher son permis, avant de se rappeler qu'il l'avait oublié chez son père. Ce dernier travaillant à la mine de sel de Havre-aux-Maisons, il a fallu demander à un voisin de lui rendre service et de venir porter le papier. Bernard Chevrier, bien assis dans sa chaise de capitaine, a regardé des reportages de chasse tout l'après-midi. Profitant d'un moment de solitude, Simone est allée dans la cabine et a discrètement envoyé un texto à Érik Lefebvre pour lui expliquer son départ imminent. Elle risque d'être difficile à joindre au cours de la prochaine semaine et ne veut pas qu'il s'inquiète. Elle ne s'est pas plainte de l'équipage récalcitrant, non. Ce n'est pas la première fois que des hommes rechignent à prendre une femme à bord. Elle a même connu ça avec des confrères de la garde côtière, jadis, et elle s'en est toujours sortie indemne. Si elle avait voulu être bien accueillie au travail, elle aurait opté pour un autre métier. Elle serait devenue infirmière ou, comme sa soeur, aurait ouvert une école de yoga. Mais elle a choisi la mer.» La danse du figuier par Emné Nasereddine paru en 2021 aux éditions Mémoire d’encrier. Sur la page en noir et blanc le passé de l’autrice reprends des couleurs. La maison chante à nouveau, trois générations de femmes : Téta, la grand-mère, Fadwa, la mère et Emné, la fille, qui nous parle de ses racines, de la tendresse reçue en héritage malgré les blessures de la guerre et de la douleur de la perte d’être chers. Emné Nasereddine regarde son pays si loin si proche, Beyrouth la rouge, depuis Montréal la blanche. Sa voix, ses gestes se font tendres pourtant. Au pays de son enfance les femmes meurent avant d’écrire. Noir sur fond blanc, les mots nous ramènent alors l’odeur de la méditerranée, du goût du thé sucré et de l’orange amère. L’exil et le deuil ne suffiront pas à ternir cet élan de vie, l’autrice ne désoleillera pas. Emné Nasereddine est invitée à Mission encre noire. Extrait:« Mon angoisse, vous la connaissez/elle a une forme tangible et son propre goût/ma peur vous l'avez nourrie/au fond du gosier/par les pratiques du papier blanc/le nom mal prononcé/le refus d'entrée/je remet mon destin entre vos épaules/faites de moi une personne féconde/faites de moi une poète réconciliée/je suis à deux pas de vos yeux/prête à accueillir une nouvelle/je patiente »
60 min
Mission encre noire 08 juin
Émission du 8 juin 2021
Mission encre noire Tome 31 Chapitre 360. Exosquelette de Chloé LaDuchesse paru en 2021 aux éditions Mémoire d’encrier. «mes os sont toujours creux, il n'y a rien à faire.» constate la poète, en se remémorant une nuit, en Ontario, avec des amis autour d'un brasero à l'automne. De cette image découle un geste d'écriture.  Les petites histoires s’accumulent, tissent un filage à même la peau, qui d’une maille entrelacées à l’autre racontent et dévoilent la charpente qui consolide l’exosquelette de l’autrice. L'écriture devient un abri, une maison pour celle qui a été si souvent de passage. Pour Chloé Laduchesse, la poésie est cette armature souveraine, derrière laquelle elle pourrait disparaître. Ce n’est qu’un leurre pour mieux réapparaître à vif, lestée des fantômes impudents qui empêchent le corps de vivre librement. Ce qui n'empêche pas l'autrice de vivre profondément ses tempêtes, de savoir se camoufler pour mieux se tenir debout. Dans l’orange du soir, du côté de Sudbury, en Ontario, je retrouve Chloé LaDuchesse, elle est invitée à Mission encre noire. Extrait: « Un petit matin monochrome/à peine plus grand/qu'un jeu de patience/j'emprunte aux figures de proue/leurs horizons déployés/leur savante ubiquité/mes pas menus dans la neige/réinventent la carte aux trésors/je cherche/la langue qui sait/comment dire merci aux ponts/sous lesquels on passe » Fouiller les décombres de Flavia Garcia paru en 2021 aux éditions Mémoire d’encrier. Ni oubli ni pardon. En 1976, la poète a 12 ans. Elle qui pensait pouvoir tourner le dos à son passé douloureux argentin en débarquant à Montréal a tort. Les noms de Peron, Ongania, Lopez Rega ou du général Videla ressortent à l'occasion d'une rencontre avec un livre au festival international de la poésie de Trois-Rivières: Palabra viva. Cette parole redonne vit à une expression : Nunca mas. Les mots, qui dans toute la terreur des yeux d’un enfant, existent ici, sur ces pages, sont là pour témoigner, mais pas seulement. Si les coups de feu, les hélicoptères, les sirènes, l'odeur de mort qui suinte des murs laissent des traces indélébiles, c’est pour dire qu’on ne négocie pas avec la peste, on ne lui laisse plus aucune chance. Plus jamais. Ce recueil paraît dans le cadre du 45 ème anniversaire du coup d’État de 1976 en Argentine, et en souvenir des victimes de la dictature. je reçois Flavia Garcia à Mission encre noire. Extrait:« dans la cour d'école/on joue à la marelle/on sautille sur un pied/l'équilibre est fragile/puis sur l'autre/plus haut/on rebondit/pour atteindre le ciel/criblé de barbelés»      
60 min
Mission encre noire 01 juin
Émission du 1 juin 2021
Mission encre noire Tome 31 Chapitre 359. Josée Yvon: Danseuses-mamelouk paru en 2020 aux éditions Les Herbes rouges, Travesties-kamikaze paru en 2019 aux éditions Les Herbes rouges, Maîtresses-cherokees paru en 2021 aux éditions Les Herbes rouges. L'oeuvre de Josée Yvon paraît aux herbes rouges en 1976, avec son premier livre, Filles-commandos bandées, suivi de peu par Travesties-kamikaze. Depuis le réédition des trois premiers volumes de son oeuvre, le nom d'Yvon revient plus souvent comme une référence incontournable pour toute une nouvelle génération d'écrivaines au Québec. je vous propose de partir à la rencontre de Josée Yvon, dont les mots sont restés longtemps introuvables en librairie et en bibliothèque. Denis Vanier, son compagnon durant dix huit ans dit d’elle en postface de Danseuses-Mamelouk : «une des voix les plus lucide d’Amérique comme un film de monstres, de bowling et parfum/c’est une fille d’en dedans/de folie sauvage; une écriture dangereuse/comme un gun dans le corps bandé du silence.» Pour nous parler de la «fée des étoiles », à travers la réédition de ces trois recueils, je reçois la directrice des éditions Les Herbes rouges Roxanne Desjardins, à Mission encre noire. Extrait : «mais nous nous sommes le désir/nos vieilles femmes défient le rhéostat des veines/font bander toutes les cicatrices/et se parlent à l'orifice des corps./notre folie n'annule pas l'efficacité du scandale/les buveurs dartre à la frontière des os/pissent la danseuse/off de leur tête/encerclées aux morsures de la Menterie/il faut s'habituer à partir tous les jours./les petites filles bandées dangereuses/sèment la mort sur l'autoroute.» Tisser de Jean-Luc Raharimanana paru en 2021 aux éditions Mémoire d'encrier. Au commencement il y eu Ralanitra le ciel, le principe mâle, qui créa les étoiles et la terre: Ratany, le principe femelle. Une terre sans vie informe. Ainsi débute le mythe malgache qui modèle la naissance de notre monde. Une mythologie millénaire qui se présente ici à nous, dans un formidable texte entre fable et philosophie qui se décline par delà les époques, à travers la voix d’un ancêtre, un enfant mort-né, qui va nous raconter la genèse de l'humanité comme vous ne l’avez certainement jamais lu. Traversée et brisée par l’esclavage, la colonisation et la mondialisation, cette parole empreinte aux mythes fondateurs anciens une trame qui sert de boussole à cette voix. Cet esprit qui s’adresse à nous est le fil qui tisse le récit de ce livre étonnant. Issue du continent africain et de multiples autres influences, on le trouve dans toutes les langues, dans les proverbes, les contes, les littératures, le jazz, la peinture. Contre toute attente, les mythes anciens pourraient nous communiquer un moyen de déconstruire nos absurdités collectives pour reconstruire le monde autrement. Je vous propose de partir à la rencontre d’un imaginaire renversant qui se donne à lire comme fibres à tisser d'une autre humanité possible. Je reçois Jean-Luc Raharimanana, ce soir à Mission encre noire. Extrait : « Depuis trop longtemps, la pensée africaine est phagocytée, avalée, presque digérée. Mais cette pensée n'est pas morte. Elle est dans les langues, dans les proverbes, contes,mythes, littératures, musiques, peintures, dans les arts, dans l'artisanat, dans les rites d'initiation, dans les philosophies et autres visions du monde qui irriguent les cérémonies, les folklores, les liens familiaux, sociaux, etc. Les siècles de domination successive empêchent un libre récit des relations avec le monde, mais ces temps n'ont pas à vrai dire pu effacer ce récit de la société des Vivants. L'Afrique est là, l'Afrique est en nous, elle est aussi en les autres, dans le jazz et dans la musique moderne, dans la peinture, dans l'alimentation, dans l'imaginaire, dans le sang même de l'humanité. Elle a à célébrer cette résilience, à comprendre comment ses enfants, pour survivre, ont dû investir l'Autre et s'y déposer intacts. car si l'oppresseur porte atteinte à la victime, il n'en sort pas indemne non plus, la teinture ne choisit pas forcément qui colorer quand divers tissus se mêlent et s'emmêlent.»  
60 min
Mission encre noire 25 mai
Émission du 25 mai 2021
Mission encre noire Tome 31 Chapitre 359. Josée Yvon: Danseuses-mamelouk paru en 2020 aux éditions Les Herbes rouges, Travesties-kamikaze paru en 2019 aux éditions Les Herbes rouges, Maîtresses-cherokees paru en 2021 aux éditions Les Herbes rouges. L'oeuvre de Josée Yvon paraît aux herbes rouges en 1976, avec son premier livre, Filles-commandos bandées, suivi de peu par Travesties-kamikaze. Depuis le réédition des trois premiers volumes de son oeuvre, le nom d'Yvon revient plus souvent comme une référence incontournable pour toute une nouvelle génération d'écrivaines au Québec. je vous propose de partir à la rencontre de Josée Yvon, dont les mots sont restés longtemps introuvables en librairie et en bibliothèque. Denis Vanier, son compagnon durant dix huit ans dit d’elle en postface de Danseuses-Mamelouk:«une des voix les plus lucide d’Amérique comme un film de monstres, de bowling et parfum/c’est une fille d’en dedans/de folie sauvage; une écriture dangereuse/comme un gun dans le corps bandé du silence.» Pour nous parler de la «fée des étoiles », à travers la réédition de ces trois recueils, je reçois la directrice des éditions Les Herbes rouges Roxanne Desjardins, à Mission encre noire. Extrait:«mais nous nous sommes le désir/nos vieilles femmes défient le rhéostat des veines/font bander toutes les cicatrices/et se parlent à l'orifice des corps./notre folie n'annule pas l'efficacité du scandale/les buveurs dartre à la frontière des os/pissent la danseuse/off de leur tête/encerclées aux morsures de la Menterie/il faut s'habituer à partir tous les jours./les petites filles bandées dangereuses/sèment la mort sur l'autoroute.» Tisser de Jean-Luc Raharimanana paru en 2021 aux éditions Mémoire d'encrier. Au commencement il y eu Ralanitra le ciel, le principe mâle, qui créa les étoiles et la terre: Ratany, le principe femelle. Une terre sans vie informe. Ainsi débute le mythe malgache qui modèle la naissance de notre monde. Une mythologie millénaire qui se présente ici à nous, dans un formidable texte entre fable et philosophie qui se décline par delà les époques, à travers la voix d’un ancêtre, un enfant mort-né, qui va nous raconter la genèse de l'humanité comme vous ne l’avez certainement jamais lu. Traversée et brisée par l’esclavage, la colonisation et la mondialisation, cette parole empreinte aux mythes fondateurs anciens une trame qui sert de boussole à cette voix. Cet esprit qui s’adresse à nous est le fil qui tisse le récit de ce livre étonnant. Issue du continent africain et de multiples autres influences, on le trouve dans toutes les langues, dans les proverbes, les contes, les littératures, le jazz, la peinture. Contre toute attente, les mythes anciens pourraient nous communiquer un moyen de déconstruire nos absurdités collectives pour reconstruire le monde autrement. Je vous propose de partir à la rencontre d’un imaginaire renversant qui se donne à lire comme fibres à tisser d'une autre humanité possible. Je reçois Jean-Luc Raharimanana, ce soir à Mission encre noire. Extrait:« Depuis trop longtemps, la pensée africaine est phagocytée, avalée, presque digérée. Mais cette pensée n'est pas morte. Elle est dans les langues, dans les proverbes, contes,mythes, littératures, musiques, peintures, dans les arts, dans l'artisanat, dans les rites d'initiation, dans les philosophies et autres visions du monde qu irriguent les cérémonies, les folklores, les liens familiaux, sociaux, etc. Les siècles de domination successive empêchent un libre récit des relations avec le monde, mais ces temps n'ont pas à vrai dire pu effacer ce récit de la société des Vivants. L'Afrique est là, l'Afrique est en nous, elle est aussi en les autres, dans le jazz et dans la musique moderne, dans la peinture, dans l'alimentation, dans l'imaginaire, dans le sang même de l'humanité. Elle a à célébrer cette résilience, à comprendre comment ses enfants, pour survivre, ont dû investir l'Autre et s'y déposer intacts. car si l'oppresseur porte atteinte à la victime, il n'en sort pas indemne non plus, la teinture ne choisit pas forcément qui colorer quand divers tissus se mêlent et s'emmêlent.»  
60 min
Mission encre noire 11 mai
Émission du 11 mai 2021
Mission encre noire Tome 31 Chapitre 358. La désidérata par Marie-Hélène Poitras paru en 2021 aux éditions Alto. Alouette, gentille alouette, Alouette, je te plumerai. Aliénor sourit malicieusement, elle a soif de justice. Depuis le bois, elle observe le domaine de Malmaison, elle, qui fait jaillir la vie animale et végétale de ses mains. Un lourd secret entoure le village de Noirax. Un silence drape l’héritage de la lignée des pères Berthoumieux, tous, l'exacte réplique du même homme. Les alcools et la bonne chair ne font qu’illusion, l’éternel souvenir de la dernière épouse repose dans la maison aux parfums, fermée à double tour sur une vérité qui dérange et menace. Pampelune, la bougresse, Héléna, la Pimparela, connaissent bien le cycle des amours déçus, des chagrins qui rongent, des enfants illégitimes. D'espoirs en défaites, c'est une rengaine d'une grande tristesse. Cependant, la rumeur se propage au village, le charme d'Aliénor agit comme un puissant parfum et se répand comme une fièvre. Le fils Berthoumieux s'en émoustille déjà. Un nouveau règne est en marche. Presque dix ans après la publication de Griffintown, Marie-Hélène Poitras lève le rideau sur ces voix que l’on tente de bâillonner. Je vous propose de nous faufiler au travers des secrets entortillés autour des racines de cette forêt et d’en animer ses marionnettes d’une main tremblante. L'autrice l'affirme : les loups sont parmi nous ! Je reçois Marie-Hélène Poitras, à Mission encre noire. Extrait:« Il y a quelques années, quand Jeanty avait quatorze ans, une nuit alors que son père dormait, il était monté au grenier et était tombé nez à nez avec un grand miroir ovale sur pied. Ce qu'il découvrit dans le reflet de la psyché le dégoûta. La ressemblance avec son père s'installait. En plus de la couleur des yeux et du nez aquilin, sur son visage les traits distinctifs des Berthoumieux commençaient à l'emporter sur la douceur de ceux de Pampelune. Le duvet au-dessus de sa lèvre, la carrure plus marquée des épaules, l'élargissement du muscle trapèze et, surtout, ce je-ne-sais-quoi d'un peu débile que les pères Berthoumieux affichaient sur leur portrait, tous ces attributs étaient en train de poindre en lui. Le constat était inévitable, la transformation bien amorcée: il ressemblait à son père. N'en pouvant plus, Jeanty tourna la psyché à l'envers. Ce qu'il découvrit de l'autre côté du miroir l'émerveilla.» La revue Moebius 168-169, Depuis la crise. Enfin ! Il est annoncé depuis quelques mois déjà, le numéro double de la revue Moebius est désormais disponible. Cette nouvelle édition, avec à la barre Stéphanie Roussel et Nicholas Dawson, se propose de renverser les tendances et de bousculer les idées reçues. À travers un thème de circonstance: Depuis la crise, le duo se propose de résister à l’isolement, de briser «les fils invisibles des confinements successifs», pour en faire un moment de solidarité et d'ouverture. Autant dire que le pari est amplement réussi par la qualité des textes publiés, mais également par le souci de variétés des sujets et des expériences de lecture offert par le comité de rédaction. Au programme de ce Moebius: Rébecca Déraspe, Katia Belkhodja, Dalie Giroux, Sandrine Galand, Marie-Christine Lemieux-Couture, Kama La Mackerel, Mishka Lavigne, Laurence Olivier, Cato Fortin, Emmanuella Feix, Si Poirier, Sophie Bélair Clément nous parle de création en temps de crise. Moebius accueille dans ses pages, pour quatre numéros, Ouanessa Younsi et Awa Banmana, en tant qu'écrivaine et artiste en résidence. Et enfin Marie-Ève Lacasse se charge de la traditionnelle lettre à une écrivaine vivante. Pour en savoir plus sur ce sommaire Stéphanie Roussel et Nicholas Dawson sont invité.e.s à Mission encre noire. Extrait:« Je fais une liste de ce que la décapitation n'est pas: une fusillade, un attentat à la voiture piégée, une bombe, un démembrement, un égorgement, une plainte académique. Je fais une liste de ce que la décapitation n'est pas, ça commence comme beaucoup de listes à cause des journaux et des statuts dans lesquels personne, jamais, n'a eu peur d'être décapité. Là où j'ai grandi, les embaumeurs apprenaient à recoudre les têtes sur les cadavres. Là où j'ai grandi, des barbus se transformaient en guillotines, on les appelait nos frères.» katia Belkhodja, Moutabarridja, p45, Moebius 168-169.
60 min